1er – 9 AOÛT 1927: LE REPLI ESTHÉTIQUE
Le souvenir lumineux qu’avait laissé dans les coeurs la Fête des Vignerons de 1905 décuple les attentes de chacun en 1927.
La Confrérie des Vignerons n’ose pas prendre de risques artistiques importants et cherche à reconduire l’équipe de 1905, soit Gustave Doret pour la musique et René Morax pour le livret. Ce dernier décline l’offre, alors que Doret se laisse séduire par ce nouveau défi tout comme Ernest Biéler qui avait collaboré avec Jean Morax aux décors et costumes de 1905.
La Fête des Vignerons malgré un monde viticole en crise
Le monde de la viticulture a changé depuis les deux dernières éditions de la Fête : de nombreux vignerons ont abandonné leurs parchets pour chercher dans les usines nouvellement créées à Vevey un gagnepain plus assuré et régulier. Beaucoup de parcelles, jadis vouées à la viticulture, sont cédées au développement urbain. Les choix artistiques de cette Fête sont plus traditionnels : on ressent le besoin de se raccrocher à des valeurs sûres. On glorifie la terre, la patrie, le travail traditionnel des paysans et des vignerons, on mélange les genres vestimentaires qui ont déjà fait leurs preuves lors des éditions précédentes. Les décors ne font plus appel à l’Antiquité gréco-romaine, mais à notre propre passé: une muraille et son chemin de ronde médiévaux s’inspirant des donjons et des enceintes des châteaux de Romont, de Lucens, d’Estavayer et de Gruyères servent de décor et d’entrée aux divinités et aux figurants. Dans un contexte économique difficile, alors que les valeurs traditionnelles étaient appelées à disparaître ou à s’adapter à des conditions nouvelles, la Fête des Vignerons représente un lieu de mémoire et d’identité où chacun tente, en puisant aux sources d’un passé commun, de retrouver un espoir en des temps meilleurs.
Chanson du petit chevrier
«Je chante et souvent mon coeur me fait peine. J’aurai mes quinze ans l’automne prochaine. Je chante tout seul dans les éboulis, pour rien pour personne, tout l’après-midi. Hodiriadou.
C’est au petit jour que je m’achemine au pied de la tour, ma chèvre est maligne. On entend sonner, dans tout’la montagne mon troupeau léger, mon chien m’accompagne. Hodiriadou.
Le rhododendron, la belle gentiane, quand nous reviendrons ce sera pour Jeanne ! J’y pense à midi, quand tout est tranquille, j’ai bien du souci, elle est à la ville. Hodiriadou». Livret officiel, Fête des Vignerons 1927, Vevey, 1927
Spectacle
Abbé-Président: Emile Gaudard
Mise en scène: Edouard Vierne, remplacé par A. Durec, de Paris, à quelques semaines de la Fête, il sauva la mise en scène du spectacle
Musique: Gustave Doret
Livret: Pierre Girard
Costumes: Ernest Biéler
Vignerons couronnés
Jean Borlat
Jean Herzog
Henri Roux
Félix Dubuis (et 60 vignerons distingués et primés)
Arènes et décors
Fer à cheval; Biéler dessine en toile de fond une muraille de ville moyenâgeuse (inspirée par Estavayer, Lucens, Gruyère et Romont) avec 3 portes, des tours et un chemin de ronde 14 000 places
Costumes style XVIIIe siècle
Spécificités et nouveautés
Paysans, vanniers, chevriers
Messager boiteux
Retour de Noé
La fête en chiffres
2000 figurants, 5 corps de musique, 1 orchestre de 150 exécutants
6 représentations
Les places coûtent entre 5.50 et 82.50 francs
La Fête coûta 1 202 497 francs
Bénéfice: 216 215 francs
Capital de garantie: 388 500 francs souscrits par 725 souscripteurs et 75 000 francs par la Confrérie